Yule, Yule baby.
Une fête païenne aux multiples facettes.
Pendant que le cortège supposé mettre à mort le Roi de Houx s’avançait dans les rues de Parys, le Louvres accueillait un autre genre de cérémonie. Plus belle, plus chaude, plus fastueuse. La salle de bal ressemblait à un palais de glace, grâce aux bons soins du Triumvirat et de leur magie. Des flocons de neige inoffensifs tombaient du plafond et disparaissaient en entrant en contact avec une surface quelconque. Les invités rivalisaient de faste et d’originalité, pour aborder des costumes thématiques aux couleurs glacées.

Ici, point de Père Noël car la figure n’a jamais existé. Par contre, des krampus, des bonhommes de neige, des étoiles, des fées d’hiver des deux sexes, avec plus ou moins de vêtements, des reines et rois de neige, des flocons, des garous blancs sous leur forme animale, des nuances lumineuses et solaires.

Le Marquis de Batz surveillait les invités d’un œil acéré, engoncé dans un costume vert feuille, les cheveux teints en blanc, le crâne surmonté par de grands bois de cerf, le nez recouvert par une truffe cervidé. Son air sérieux tranchait avec le ridicule de son costume, mais il ne parvenait pas à s’en préoccuper. Soucieux, à cause de sa Reine qui dansait, inconséquente, au centre de la piste, il jetait un œil troublé à tous les invités.

A cette fille, dans un coin, qui fleurait le garou et qui peignait la scène pour la postérité. C’était grâce à Arthur qu’il l’avait faite venir, s’intéressant à son mécénat, désireux d’immortaliser ces instants à l’ancienne mode, ne parvenait pas à s’adapter à la photographie. Méfiant, car elle n’appartenait pas à la meute de François, il la trouvait dissipée. Elle jetait des coups d’œil un peu partout, et il se demandait si c’était uniquement à cause de la beauté du lieu.

Le bal n’était pas réservé qu’à la noblesse. Au hasard, des gens du peuple avaient reçu une invitation et l’un d’eux inquiétait Tomas plus que les autres. Déjà, parce qu’il n’était pas venu seul. Ensuite, parce que ses compagnons, comme lui-même, détonnaient dans cet endroit magique. S’il n’avait pas fleuré l’humain, et si sa Reine ne l’avait pas tancé quand il avait voulu les jeter à la porte, Chester et les siens n’auraient pas pu contempler la salle de bal bien longtemps. Si un problème survenait, aucun doute qu’il viendrait de là.

Ah, douce naïveté.
Cela commença par les lustres en cristal, qui clignotèrent jusqu’à s’éteindre. Heureusement, un sorcier dans l’assistance eut la présence d’esprit d’allumer ses paumes, bientôt imité par d’autres. Les lumières, toutes relatives, dévoilèrent des petites créatures rondes, pelucheuses, dotés d’une grande langue rose et de cornes. Certaines portaient la moustache –ce qui rappela au Marquis un amer souvenir– d’autres des chapeaux haut-de-forme, des monocles, des bois de rennes et des bonnets à pompons. Certains grignotaient des cookies, des spéculoos, et ils paraissaient inoffensifs. Adorables, même.

La Reine se pencha pour en caresser un, l’œil brillant, le cœur attendrit. Lorsque ses doigts touchèrent l’un d’eux –qui, ironiquement, portait une moustache– une couronne apparut sur son front, et il déclara d’une voix grave :

— Je suis le Roi des Poros, je suis le Dieu de l’Hiver. Divertissez-moi, ou périssez !

Et, en guise d’exemple, un vent glacé gela des personnes au hasard. Chester vit l’un de ses compagnons se figer, une mine ahurie dessinée sur ses traits devenus bleus. Taïsiya fut forcée de s’arrêter de peindre, ses couleurs recouvertes de glace. Quant à Tomas, qui avait déjà sorti sa lame pour intervenir, il fut frappé d’un phénomène plus qu’étrange : des poils blancs poussèrent sur tout son corps, il perdit des dizaines de centimètres, et se retrouva changé… En poro ! Ce qui ne le privait pas de la parole, mais créa un vent de panique chez les invités.


✎Les règles à respecter

Bien le bonsoir, mes chers petits sbires.
Voici l'évènement de Yule. Nous vous avions promis du fun, vous ne serez pas déçus ! Nous vous avons répartis en deux groupes: un à l'extérieur du Louvre, et l'un dedans. Vous n'aurez pas le loisir d'échanger, car vous serez bien trop occupés à vous sortir de ces cocasses situations.

Vous avez le droit de poster dans l'ordre que vous voulez, aussi souvent que vous le souhaitez. Pour ma part, je vais intervenir de manière ponctuelle, pour remettre un peu de piments dans vos aventures si je juge que vous vous en tirez trop facilement, ou pour vous donner certaines informations. Notez que vous pouvez inventer ce que vous voulez. L'idée, c'est de construire l'évènement ensemble, donc n'hésitez vraiment pas. Plus c'est fou, plus c'est drôle et troll, plus mes désirs seront satisfaits.

Vos posts ne devront pas excéder les 400 mots et en compteront au minimum 200, afin de favoriser le dynamisme des échanges.

Si vous avez la moindre question, ma boîte à MP est ouverte. Mais oserez-vous me déranger, sbires?


✎Ce qu'il faut savoir

Message à chacun d'entre vous :
- Tomas, tu as été transformé en poro ! Tu es une créature adorable, toujours doté de parole, mais tu as perdu tes attributs d'immortel. Plus de dents pointues, de force surnaturelle, de sens surdéveloppés. Tu en viens à te demander si, par hasard, n'importe quoi ne pourrait pas te tuer. Comment protéger ta Reine, dans ces conditions? Note que tu as toujours tes bois sur la tête, et une charmante moustache qui ressemble fort à la tienne.
- Taïsiya, tu es ici pour deux raisons. La première, exercer ton art. La seconde, glaner des informations pour le compte de l'Assemblée. On pourrait croire qu'ils sont responsables de tout ceci, mais personne ne t'a prévenu. Est-ce pour te protéger? Toujours est-il que ta palette de couleur est collée à ta main à cause du froid, et que les poros dégagent une odeur succulente de friandises hivernales. Ils te fascinent, et tu as très envie d'en croquer un. Mais est-ce une bonne idée?
- Chester, tu avais prévu un mauvais coup, et voici que tu te fais devancer ! Outre la frustration bien compréhensible, tu remarques que si on touche une personne gelée, on gèle soi-même. Tu remarques aussi qu'un poro se frotte à ta jambe et te regarde avec ses grands yeux adorables. Vas-tu le caresser ou risquer de le contrarier? Fais le bon choix...

Ni paranoïa ou sentiment de culpabilité. Pour autant elle n’aura pas la prétention de croire qu’elle a toute la confiance du baron. Il n’y a rien d’autre que cette façon dérangeante dont il la regarde qui aurait pu justifier d’une méfiance amoindrie. Le vampire n’est pas créature à s’encombrer de faiblesses sentimentales. Elle le croit prompt à se débarrasser de quiconque aurait le malheur d’agiter son cœur éteint.
C’est un test. Peut-être. Sûrement. Mais pas pour ce qu’elle pense.
Et pourtant la louve est là, cachée en pleine lumière. Dans sa jolie robe blanche payée avec les deniers du noble, c’est elle qui a l’air d’un agneau au milieu des loups. Ange égaré dans le dernier cercle de l’Enfer de Dante, celui de la Trahison. Là où réside Lucifer.

Le diable est une femme qui virevolte au milieu de sa cour. Taïs n’aurait jamais cru pouvoir l’approcher autant. Air insouciant sur ses traits figés d’éternité contrastant avec les mines renfrognées de ses mousquetaires. A différents moments de cette soirée elle a trouvé une excellente raison d’approcher chacun d’eux. Elle a inspiré leurs odeurs, les imprimant dans sa mémoire olfactive. Ce soir toute information est bonne à prendre. La peinture lui a donné la bonne habitude de reconnaître l’importance du moindre détail. Tout ce qui lui semble judicieux d’être relevé sera rapporté à l’Assemblée, comme l’a été sa présence ici.
Son pinceau trouve un moyen de les retranscrire sur la toile, souvenir figé de ces corps en mouvement.

Une bourrasque glaciale se faufile sous sa robe. Sa palette devient une extension de sa main. Cette brise soudaine emporte effluves de parfums capiteux pour apporter une appétissante odeur… de strudel aux pommes. Elle relève le nez de sa toile à la recherche de la source de cet arôme douceâtre, pour aviser ces petites créatures pelucheuses qui ont envahi la salle. Elle cligne des yeux. Une fois. Puis deux. Scène surréaliste qui la pousse à se demander si elle a mal géré son don au point de rentrer en transe ce soir. Elle ignore cette petite voix au fond de sa tête murmurant que ce serait vraiment dangereux pour elle, pour écouter celle de son estomac qui la presse de satisfaire son appétit. Regarde donc cette petite créature pâré des mêmes cornes que le marquis, pourquoi ne le croquerais-tu pas. Regarde comme il a l’air délicieux. Allez juste un petit bout.

Le roi des poros contemple le Marquis, rattaché par la force de sa magie à son peuple. Un sourire bonhomme étire sa grosse moustache, il s'apprête à lui répondre, quand quelque chose attire son attention. Ou plutôt, quelqu'un.

— Non, non, non ! s'exclame-t-il, furieux. Ce doit être une fête, pas une bataille !

Des boules de neige tombent du plafond, se concentrent autour de Chester. Elles deviennent de plus en plus grosses, de plus en plus lourdes, et le suivent avec pour intention manifeste de le transformer en bonhomme de neige moderne. Cela force Chester à se rapprocher du groupe de vampire, qui a entouré la Reine Nocturne.

Mais ce drame échappe complètement à la royale apparition, qui répond enfin au Marquis:

— Je veux du bonheur, de la joie, des émotions sincères. Je veux que les apparences tombent, que vous ne soyez plus qu'un.

A ces mots, l'épidémie de poroisation s'accroit, jusqu'à ce que tous les invités soient touchés. Pour autant, ils ne sont pas débarrassés de leurs bas instincts...


✎Ce qu'il faut savoir

Message à chacun d'entre vous : Félicitations, vous êtes tous devenus des poros ! Et quand je dis « tous » cela inclus tous les protagonistes, PJ et PNJ. Oui, même la Reine a été transformée !
Toutefois, cela ne vous arrache pas à vos instincts...
- Tomas, le mousquetaire qui te portait est devenu un poro à son tour. Il va te falloir laisser tomber ta froideur et ta retenue si tu veux t'en sortir.
- Taïsiya, tu es devenue un poro toi aussi, mais tes instincts sont toujours là et tu as très envie de croquer dans l'une de ces créatures. Que se passera-t-il, si tu cèdes?
- Chester, la magie a eu un étrange effet sur toi et tes compagnons. Ceux qui sont parvenus à trouver des armes sont devenus des poros armés, ils ont fusionné dans un étrange ensemble, ce qui le rend particulièrement dangereux. A toi de voir si tu veux profiter de l'occasion ou si tu vas te plier aux ordres du roi.

N'hésitez pas à prendre des initiatives et à relancer ! Le roi des poros veut des sentiments sincères et de la magie de Noël, et il ne peut être trompé...

C'est digne d’un vieux cartoon, un petit ange sur une épaule et une version démoniaque sur l’autre. Cette dernière semble obsédée à l'idée de se remplir l'estomac et qu'elle ne trouvera pas mieux que ces adorables petites créatures passablement caractérielles. Après le Marquis, elle pourra s’attaquer à ce petit Dieu de l’Hiver bien dodu. A croire qu’elle a un petit penchant pour les poros à moustache. Cette idée la fait sourire. Il veut de la joie et du bonheur. Elle va lui en donner. Ou plutôt en prendre quand elle sera en train de le boulotter.

Taïs l’entend presque, sa conscience qui se tape la tête contre sa caboche. Ce qu’elle ne peut pas louper ce sont les coups de feu. Elle se baisse pour regarder autour d’elle, guettant des visages familiers. Pas de membres de l’Assemblée, pour ce qu’elle sait. Lucidité quand tu nous tiens. Elle se demande s’ils sont derrière tout cela, qu’ils ne l’ont pas prévenu pour qu’elle ait l’air plus crédible. Si c’est le cas, elle n’est pas certaine de savoir comment le prendre. Même en sachant ce qui allait se passer, elle est persuadée qu’elle aurait eu l’air tout aussi ahurie.

Elle se redresse, reportant son attention sur son futur en-cas. Au milieu de cette débandade elle s’avance vers celui qui est désormais jugé sur l’un de ses mousquetaires. C’est drôle, ce dernier ne lui semblait pas aussi grand, comme le reste de la Cour d’ailleurs. Et pourquoi avance-t-elle aussi lentement. Elle baisse ses yeux sur ses jambes pour les découvrir minuscules. Pour se découvrir minuscule et couverte de poils. Confirmation, elle n’aurait jamais été assez prête pour ça.
Mais elle peut s’en servir à bon escient. Ils sont nombreux à avoir été transformés. Elle se mêle à la foule, s’approche des poros armés qui semblent disposés à s’en prendre aux courtisans et leur demande avec sa bouille pelucheuse de s’occuper de ceux autour du Marquis. Passé la stupeur, si tant est qu’on puisse lire la surprise sur leur visage, ils obtempèrent et lui ouvre la voix jusqu’au chambellan qui se trouve en bien mauvaise posture avec un deuxième trou dans son noble postérieur. Alors ça c’est parfait. Une pierre deux coups. Satisfaire son appétit et saborder la royauté. Ni une ni deux elle plonge sur lui. Décontenancée par sa propre taille, elle méjuge la distance et plante ses petits crocs dans sa fesse droite.

Les révolutionnaires ont choisi de s'allier, amis de circonstance. Anarchistes d'un côté, républicains de l'autre, comment distinguer l'ami de l'ennemi, quand tout le monde ressemble à un poro?
Car c'est bien là le nœud du problème. Certes, le Marquis se démarque grâce à ses bois et sa marquée s'en voudra longtemps de l'avoir contraint à les porter. Et la reine se distingue par sa couronne... Heureusement, Charlotte de France n'est pas qu'un pantin, n'a rien d'une idiote. Elle s'en débarrasse en la glissant sur la tête de quelqu'un d'autre, un courtisan ou un terroriste, peu lui importe. Si bien que c'est cette cible, qui est abattue par Chester et par ses compagnons, pendant que Taïs boulotte la fesse droite du Marquis de Batz.

La Cour Nocturne est en mauvaise posture, mais c'est sans compter l'intervention du Roi des Poros. Soudain, il grossit. Il grossit, ses sourcils se rapprochent, sa moustache frémit et une colère brûlante transforme l'atmosphère, teinte le blanc de rouge.

— STOP ! hurle-t-il.

Et tout le monde est contraint d'obéir, figés dans des positions improbables. Chester, en train de viser la fausse Reine qui git dans une marre de sang. Taïs, les dents enfoncées dans les fesses de Tomas, et les autres, qui s'enfuient, qui pleurent, qui hurlent, qui se cachent.

— Vos sentiments sont mauvais, MAUVAIS! Vous êtes indignes, INDIGNES! Vous mériteriez de disparaître, mais je vous laisse une chance de vous rattraper, une seule. Embrassez votre ennemi, demandez pardon, ou soyez gelés pour l'éternité. Seuls ceux animés de sentiments sincères pourront bouger à nouveau.

Était-ce déjà le moment de tendre l'autre joue?

Alors Taïs, qu'est-ce que tu as appris pendant cette soirée à la Cour Nocturne ? Oh pas grand chose. La Reine Charlotte danse comme un pied et son chambellan a les fesses tendres mais un peu trop velues. Elle mettait sa tête à couper - la bonne blague - qu'aucun membre de l'Assemblée n'avait jamais prononcé ou écouter un tel débriefing.
A quel moment cette soirée avait dérapé. Pourquoi aucun des invités ou mousquetaires présents à l'extérieur n'avait tenté d'intervenir. Est-ce qu'il s'y passait aussi quelque chose qui les empêchait de le faire ?

Elle verrait plus tard pour cette possible succession de coïncidences. Pour le moment elle est en train de laisser filer une occasion de savourer son en-cas tout en mettant un sacré coup à la royauté. Ses crocs désespérément petits triturent la chair, tentent de s'en extirper pour trouver une meilleure prise mais rien n'y fait. Elle ne peut s'en dépêtrer et avale un mélange de poils et de sang. Du coin de l'œil elle accroche ce Roi de l'Hiver qui a soudainement l'air moins adorable. Autant qu'un gremlin nourri après minuit.
La neige semble se teinter du rouge de sa colère, mais pas que. Elle ne se sent pas vraiment disposée à accéder à sa requête. Il a raison sur un point cependant, la plupart des gens présents sont indignes de vivre. Mais certains le sont et pour ça elle est prête à s'incliner devant le reine, front sur son joli parquet vernis. On ne lui en demande pas tant, des excuses suffiront. Figée la bouche pleine, sans mauvais jeu de mot, elle se retrouve en incapacité d'articuler correctement. Elle baragouine des paroles incompréhensibles. Seul effet notable, ses dents glissent dangereusement entre les pattes arrières du Marquis. Taïs se retrouve nez à nez ou plutôt museau à queue, et pas avec celle en forme de joli pompon duveteux. Cette soirée est décidément pleine de surprise et pas les meilleures. A ce sujet elle aurait préféré mourir idiote.


Pour autant ce n'est pas ça qui la gêne le plus. C'est d'être un témoin involontaire des excuses qu'il prononce. Témoin d'un chagrin qui lui rappelle ce qu'elle préfère oublier la plupart du temps, que les ennemis de la République ont parfois quelques bons sentiments. Elle repousse l'empathie. Se concentre sur la seule nouvelle qui compte réellement ce soir.

La Reine est morte. Vive la République.

Le Roi des poros fixe son regard sur le Marquis. Ses yeux d'adorable peluche semblent contempler son âme. Il le pèse, le juge, puis il hoche la tête, lentement.

— Tes sentiments sont sincères.

Et Tomas peut bouger. Contrairement à Taïsiya, toujours accrochée à lui d'une manière fort peu convenable. En voilà, une histoire à raconter à son supérieur ! Si, toutefois, elle s'en sort vivante... Le roi des poros la regarde, il secoue la tête et elle reste figée, gelée, car elle n'a pas daigné répondre à ses exigences. Contrarié, il écoute un à un chaque personne présente dans la pièce. Certains sont sincères, et ils recommencent à se mouvoir. Puis c'est au tour de Chester.

— Tu ne comprends pas l'esprit de Noël. Tu seras maudit, tu devras te racheter.

Et pas qu'un peu. Chester a tout le loisir de ressentir une atroce douleur dans chacun de ses membres, d'évoluer, de muer, en une créature atroce.

— Tu seras animé d'un irrépressible besoin de rendre heureux tous les gens que tu croiseras, peu importe les conséquences sur ta personne, et ce, jusqu'à ce que tombe le dernier flocon de neige. Tu conserveras cette apparence tant que ta tâche ne sera pas achevée.

Sa moustache s'agite et il disparait, ainsi que tous ceux restés sous forme de poro et tous ceux qui ne s'étaient pas sincèrement excusés de quelque chose. La salle de fête se vida d'une bonne moitié de ses convives. Étrangement, Taïsiya resta présente, peut-être parce qu'elle avait toujours les dents enfoncées dans le Marquis? Un mystère à élucider.

Il ne reste désormais que le monstre de Noël, ou plutôt Chester enfermé dans cette enveloppe terrible, animé d'un besoin de rendre heureux, quelques membres de sa suite, une dizaine de mousquetaires, quelques courtisans, et la Reine Nocturne.
Tous ont repris leur apparence.

A vous de décider si l'affrontement vaut mieux que la fuite.

Le Marquis est blessé, a le cœur brisé par la certitude du devoir manqué. Sans cela, il aurait remarqué le subterfuge, il aurait peut-être aussi remarqué le corps nu de sa reine, quoi que cette dernière se soit hâtée de sortir de cet Enfer pour l'attendre dans son bureau, enroulée dans une couverture et royalement agacée par l'égarement de la couronne familiale, quelque part dans la salle de bal.
Merveilleux sens des priorités, ma chère.

Car plus personne n'est enfermé, et au bruit d'une porte qui claque, c'est la débandade. Les courtisans fuient, ceux qui restent du moins. Les Mousquetaires forment un mur autour du Marquis, ce qui l'empêchera d'affronter le Chester maudit et, par extension, d'y laisser son immortalité. Oublie-t-il qu'il n'a pas qu'une reine, à protéger, mais aussi une marquée?

Le Chester maudit, de son côté, prend courageusement la fuite après avoir croisé son reflet dans une vitre. Il est choqué, comme on le comprend, pauvre petit. S'il rencontre ou fréquente un jour un narakh, ce dernier pourra lui dire que sa malédiction vient de Dis et rire de toute cette mascarade. Roi des poros, mon œil !

Quant à Taïsiya, deux mousquetaires parviennent à l'arracher aux fesses du Marquis et l'emmènent à l'écart. Elle sera aux arrêts, dans une cellule des sous-sols du Louvre, pendant plusieurs heures. Jusqu'à ce que son identité soit confirmée, que l'on comprenne que tout ceci n'était qu'un énorme malentendu et, bien sûr, qu'elle présente ses plus plates excuses au Marquis de Batz pour la marque de ses dents dans son noble postérieur.
De quoi créer des liens. Peut-être.

Ainsi s'acheva cette terrible fête, avec une question néanmoins, sur toutes les lèvres: mais qui se cache derrière tout ceci? Le mystère reste entier.
Pour l'instant.